La sécurité est l'un des concepts les plus importants et en même temps les plus vulnérables et sensibles dans les sociétés (post-)modernes. Peu de sujets dominent le discours public comme la sécurité, pas de campagne électorale sans le sujet de la sécurité ni de critique du gouvernement sans évaluation de la politique de sécurité. La sécurité fait depuis longtemps partie intégrante des indices de mesure du progrès social et économique. Outre les critères objectifs (tels que le taux d'homicides et d'actes de violence enregistrés par la police), la dimension subjective, le « sentiment d'insécurité », fait l'objet d'une attention accrue. Cependant, il n'existe pas forcément de lien direct entre ces deux indicateurs. Par exemple, l'enquête sur la Sécurité réalisée au Luxembourg en 2019/2020 sur un échantillon aléatoire de 5,695 individus montre que les catégories de population chez lesquelles le sentiment d'insécurité est le plus fort, les femmes âgées, ont aussi des taux de victimation relativement faibles. A part ça, les résultats de notre enquête indiquent que le sentiment d'insécurité a légèrement progressé, bien que le taux d'homicides soit resté stable ces dernières années et que de nombreux délits connaissent une baisse : alors qu'en 2013, 19% de la population déclaraient se sentir en insécurité la nuit, ce chiffre est passé à 21% dans l'enquête de 2019/2020.
S'il n'y a pas de lien direct entre le niveau objectif de la menace et le sentiment subjectif d'insécurité ressenti par les individus, comment alors expliquer ces divergences? Dans notre contribution, nous montrons que le sentiment subjectif d'insécurité, bien qu'il semble très concret et immédiat, est en fait un phénomène complexe qui s'explique par l'interaction de multiples facteurs : changements sociétaux, de problèmes de quartier et de voisinage et de facteurs individuels.